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[LIVRE] Avec ou sans Dieu ? le philosophe et le théologien (Régis Debray et Claude Geffré)

Régis Debray, philosophe et écrivain, s’impose comme l’un des meilleurs analystes actuels du fait religieux. Pour la première fois, il débat de ses thèses avec un théologien, spécialiste internationalement reconnu de l’histoire des religions, le dominicain Claude Geffré. Dans un dialogue vigoureux, ils confrontent leurs points d’accord et de désaccord et nous aident à comprendre les enjeux contemporains des religions. – 4ème de couverture – (Editions Bayard, date de publication : février 2006; 150 pages)

 

Avec ou sans Dieu ? le philosophe et le théologien (Régis Debray et Claude Geffré)

Ramassé, dense, parfois laconique, le texte issu d’un débat s’articule en trois volets successifs. Après une première mise au point sur le fait religieux et son avenir dans cette période à la fois de la sortie de la religion et  de son retour, une deuxième partie est réservée à un examen rigoureux de ces termes de la sphère du « religieux » dont l’usage courant masque trop souvent l’imprécision de la pensée : quoi ou qui se cache derrière le fait religieux ? S’agit il d’une constante incontournable dès qu’il est question de l’humain ? Comment cela s’articule-t-il au spirituel et au politique ? Qu’en est il des rapports actuels – car ils ont évolué – entre la raison et la foi ?

Cet « état de la question » dépasse de beaucoup l’aride inventaire que j’esquisse ici. Dans une remarquable connivence intellectuelle, les coauteurs, souvent complices, parcourent ensemble les terrains qui leur sont communs. Rapidement, l’accord s’établit sur leurs divergences. Dans un troisième moment, Debray questionne Geffré sur la façon dont le christianisme parvient à se situer face à l’approche historico-critique dont il a fait l’objet depuis plus de cent ans. Qu’en est- il alors du christianisme comme révélation ; de l’Ecriture comme texte relevant d’une inspiration ? Claude Geffré est ainsi amené à une réinterprétation de ces données en soulignant qu’elles sont liées à l’inconditionnalité de la foi comme mouvement d’interrogation et de décentrement vers autre et ailleurs que soi. Autrement dit, un dépassement de l’incomplétude à quoi se réfère Régis Debray. Ce dernier reconnaît le fait d’une expérience religieuse et il en respecte l’authenticité (Thérèse de Lisieux) alors même que, pour lui, cette expérience se profile sur l’horizon, non pas d’une erreur mais d’une illusion.

Ainsi, c’est la même partition qui est jouée, mais les deux partenaires ne la lisent pas de la même façon. Si le médiologue s’intéresse à la catégorie du religieux, c’est pour en étudier le fonctionnement dans la durée ; il constate que, par là, s’instaure et se maintient un lieu de cohésion sociale. Le « religieux » fait lien. Le théologien , qui s’intéresse au sens que recèle le discours religieux , se demande « comment il est possible d’échapper au sens quand on s’occupe de ce qui fait lien » (p 40). Il se confirme que, sans s’opposer, les partenaires ne jouent pas dans le même registre. En résulte- t-il une dissonance ? : On aurait apprécié de pouvoir mieux le vérifier, notamment si telle ou telle question avait pu être approfondie ; celle de l’idée d’origine dans la création , ou encore le thème de l’Un et des multiples dans la tradition judéo-chrétienne. Ces regrets n’enlèvent rien au double intérêt de cette lecture ;

  • Il nous est donné une sorte de topographie des différentes approches du fait religieux. A notre tour nous devenons interlocuteurs dans le débat, capables de nous situer par rapport à la problématique de chacun des auteurs et à la position qu’ils adoptent. Grand moment d’intelligence, proche sans doute de ces « questions disputées » dans lesquelles au Moyen âge, excellait un Thomas d’Aquin, l’un des maîtres de Geffré.
  • Nous assistons sur le vif à un questionnement réciproque au cours duquel se construit la vérité de ce qui a été mis en cause dans le débat. Beau témoignage de santé intellectuelle.

 

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