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Un temps pour se taire, un temps pour parler

Un temps pour se taire, un temps pour parler

Il vient un temps où l’esprit aime mieux ce qui confirme son savoir que ce qui le contredit. Alors l’instinct conservatif domine, la croissance spirituelle s’arrête.

Gaston Bachelard, La formation de l’esprit scientifique.

 

Nous avons choisi de consacrer le dossier de ce numéro au travail social, au travail social et à la question spirituelle, à la question spirituelle posée à partir du travail social. Pourtant, du retour des attentats aux présidentielles américaines, du retour du confinement à l’hystérisation des débats sur les réseaux sociaux, ce ne sont pas les sujets d’une actualité débordante et angoissante qui manquent et sur lesquels porter notre double regard, celui tout à la fois de l’aspiration démocratique et de la quête spirituelle, et ce numéro s’en fait aussi l’écho.

Mais en interrogeant cette pratique du travail social, une pratique discrète et silencieuse, une pratique qui s’ancre dans des réalités humaines concrètes, une pratique qui nécessite un engagement complet des personnes, nous avons voulu aussi prendre de la distance par rapport aux événements, pour essayer de revenir à l’essentiel de ce qui fonde notre démarche.

Quelle expression étonnante que celle de travail social. Faire du social son travail ne relève peut-être pas de l’oxymore, mais d’une alliance de mots inattendue qui pose une double question de sens :

–          Le social d’abord, avec sa forte charge symbolique, qui ne s’adresse pas qu’aux pauvres et aux exclus mais, vise, au-delà de l’accompagnement des personnes, à ce que nous fassions davantage société ;

–          Le travail, ensuite qui renvoie bien sûr à un métier, à une activité professionnelle -comme le rappelle la définition juridique ci-dessous- qui peut être exercée aussi par des bénévoles, mais fait évidemment penser à la maïeutique socratique, ce travail d’accouchement qui doit permettre à chacun de « découvrir et (de) formuler les vérités qu’il a en lui ».

Et au-delà du sens des mots, de quelle recherche de sens témoigne ce travail social ? C’est à cela que nous consacrons le dossier de ce numéro. A partir de son expérience et de sa réflexion personnelle, Jean-Marie Gourvil nous invite à être sur nos deux pieds, et à ne pas oublier de faire vivre nos enracinements spirituels, en même temps que nos débats démocratiques.  Enracinement mais aussi croissance spirituelle, car dans l’ordre de la spiritualité, comme dans celui de la connaissance scientifique (et comme d’ailleurs aussi dans l’ordre de la vie en société que cherchent à régler les débats démocratiques), les acquis sur lesquels nous nous appuyons, ce que nous traduisons en général comme des valeurs, peuvent devenir si nous ne sommes pas capables de les réinterroger, autant d’obstacles qui nous empêchent de progresser, d’aller plus loin, d’aller plus haut. Comme il nous faut dépasser les obstacles épistémologiques, il nous faut dépasser ces obstacles spirituels, ces principes qui deviennent sclérosants quand ils ne sont plus inspirés. « Un temps pour se taire, un temps pour parler » dit Qohélet. La méditation sur le travail social, auquel nous invite ce numéro, nous permettra aussi de méditer avant que de débattre à nouveau sur les événements d’actualité qui nous ont fortement touchés et mobilisés ces dernières semaines.

Daniel Lenoir, président de D&S

 

Article D 142-1-1 du code de l’action sociale et des familles donnant une définition du travail social proposée le 21 mars 2017 par le Haut Conseil en Travail Social reprise par décret le 6 mai :

« Le travail social vise à permettre l’accès des personnes à l’ensemble des droits fondamentaux, à faciliter leur inclusion sociale et à exercer une pleine citoyenneté. Dans un but d’émancipation, d’accès à l’autonomie, de protection et de participation des personnes, le travail social contribue à promouvoir, par des approches individuelles et collectives, le changement social, le développement social et la cohésion de la société. Il participe au développement des capacités des personnes à agir pour elles-mêmes et dans leur environnement.

A cette fin, le travail social regroupe un ensemble de pratiques professionnelles qui s’inscrit dans un champ pluridisciplinaire et interdisciplinaire. Il s’appuie sur des principes éthiques et déontologiques, sur des savoirs universitaires en sciences sociales et humaines, sur les savoirs pratiques et théoriques des professionnels du travail social et les savoirs issus de l’expérience des personnes bénéficiant d’un accompagnement social, celles-ci étant associées à la construction des réponses à leurs besoins. Il se fonde sur la relation entre le professionnel du travail social et la personne accompagnée, dans le respect de la dignité de cette dernière.
Le travail social s’exerce dans le cadre des principes de solidarité, de justice sociale et prend en considération la diversité des personnes bénéficiant d’un accompagnement social. »

A propos Régis Moreira

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