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Individus en friche – Patrick Boulte

Note de lecture parue dans la Lettre D&S n°175 – Octobre 2020 à propos du livre de Patrick Boulte : Individus en friche, Desclée de Brouwer, Éthique sociale, 1995 ; préface de Jean-Baptiste de Foucauld

 

La vie vous réserve de temps en temps de merveilleuses surprises. Autour d’une tasse de thé, j’ai eu la chance de rencontrer Patrick Boulte, membre de D & S de très longue date. J’ai découvert un homme exquis, d’une grande délicatesse et d’une profonde sensibilité. Il m’a confié son livre « Individus en friche », le texte le plus intelligent et délicat qu’il m’a été donné à lire au sujet de l’exclusion. Il est évident qu’il s’enracine dans des expériences professionnelles et personnelles ; l’auteur prend en compte des « données psychologiques, sociales, politiques et spirituelles » comme le dit si bien Jean-Baptiste de Foucauld dans sa préface.

Dans la crise d’identité que connaît notre société » devenir ce que l’on est » reste un parcours difficile mais primordial.

C’est ma misère qui fait je dise « je », écrit Simone Weil. Quand l’homme est menacé dans toutes les dimensions de sa vie, quand tout s’effondre autour de lui, il peut faire l’expérience de son humanité profonde, encore faut-il le vouloir ou le pouvoir. Il y a des stratégies à mettre en place, la compétition, l’hédonisme, la régression … et la stratégie de la personnalisation et de la responsabilité.

Cette dernière passe par un moment de retour sur soi, sur quelque chose que l’on a enfoui au plus profond de soi et cela mène à un moment d’absolue solitude dans une société dont on se trouve exclu. A contrario, on découvre l’importance de la dimension spirituelle, au risque de se sentir séparé de ceux dont on reste cependant solidaires.

Un tel cheminement comporte des risques et peut conduire à la dévalorisation de soi, à l’auto-exclusion, à l’oubli de l’altérité, la base de toute vie sociale. Alors, comment redevenir acteur ? Le chemin d’accès à soi peut passer par un engagement citoyen, culturel, par un questionnement sur ses moyens de servir et par un retour sur sa mémoire. Un accompagnement approprié personnel ou par une association sera infiniment précieux.

D’autres possibilités sont envisageables, s’inscrire dans le domaine religieux par exemple. Peu porteur actuellement, il peut, dans le meilleur des cas, être l’endroit où l’existence de l’exclu est reconnue et légitimée : « il m’a dit tout ce que j’ai fait », comme il est écrit dans l’évangile selon saint Jean, 4,29, renouer avec le Tout Autre présent en chacun pour trouver sa propre vocation.

Il faut redécouvrir au fond de soi « une réalité calme, sereine, mystérieuse, non critique, qui échappe à l’angoisse, à la critique impitoyable et constante d’un environnement perçu comme étranger » (p. 135) et faire face à la mort sociale que l’on veut imposer à l’exclu pour en sortir.

Texte revigorant et constructif qui mérite une réédition pour soutenir notre société en recherche.

A propos Régis Moreira

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