Le carnet d’Alya
Afghanistan 1994-2050
Rana Dad est arrivée en France le 31 décembre 2016. Elle vient d’avoir 16 ans et son livre, Le carnet d’Alya, a été publié en mars aux éditions de L’Harmattan (1).
Je connais bien la famille de Rana pour l’avoir « parrainée » par l’intermédiaire de France Terre d’asile à leur arrivée en France. Le père a dû affronter pendant plusieurs années tous les obstacles imaginables que rencontrent les personnes fuyant leur pays. Il a risqué sa vie à de nombreuses reprises en haut des montagnes de l’Hindu Kuch où il a failli mourir de froid et de faim, ou, poursuivi par des gardes armés de chiens en Bulgarie, il a dû se cacher dans des rivières glacées, ou en traversant la Manche de manière clandestine en partant de Calais. Puis, rapatrié sans ménagement, il a refait le chemin de l’exil pour finalement atterrir pendant 8 mois sous une tente à Stalingrad à Paris jusqu’au moment béni où il lui a été accordé le statut de réfugié. Il a réussi à faire venir sa femme et ses 6 enfants. Ils habitent aujourd’hui en grande banlieue parisienne.
Rana est la quatrième de la fratrie. Elle a rapidement appris le Français et s’est vite retrouvée la première de sa classe mais surtout, sans y être poussée par sa famille, elle s’est passionnée pour la littérature et a passé de longues heures à la médiathèque près de son domicile pour y lire et y écrire. Elle m’a confié son manuscrit et, le trouvant tout à fait captivant, je l’ai envoyé aux éditions l’Harmattan qui ont décidé de le publier.
Rana est surprenante pour son âge. Elle déborde d’imagination. Elle met en scène de nombreux personnages d’une même famille. Commençant au moment de l’entrée des Talibans en 1994, elle donne à imaginer la vie d’une femme en Afghanistan en laissant l’espoir qu’un jour, … en 2050, il y ait une amélioration du sort des femmes.
Son livre est une sorte de « récit enchâssé » : Sohla, 15 ans, découvre à la mort de sa grand-mère Alya, en 2050, le journal de sa grand-mère qui a vécu toutes sortes de péripéties dramatiques liées à l’histoire récente de son pays. Dès que Sohla se retrouve seule, elle reprend la lecture du journal dont la guerre, avec son lot de disparitions, est le fil directeur.
Ni tout à fait un roman, ni tout à fait un conte, son récit, empreint de poésie, nous plonge dans l’univers de la culture afghane et livre un beau portrait de femme qui fait face à l’adversité malgré ses peurs.
Marie-Odile Terrenoire
Le 3 juin 2025
1/ Le carnet d’Alya – Rana Dad , Ed. L’harmattan, mars 2025