Utopie ?s
Le Monde daté du 20 août 2025, évoque dans un reportage page 5 les mobilisations contre les migrants au Royaume-Uni. « Nous ne sommes pas racistes, nous voulons juste protéger notre communauté ».
Pour aplanir ces divergences, d’un côté les habitants inquiets, de l’autre des migrants à la recherche d’un lieu de vie, quelles solutions ?
Diverses lectures m’aident à réfléchir comme l’article 1 de la « Déclaration des droits de l’homme « : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ».
Ou le nouveau manifeste des Convivialistes qui évoque les défis auxquels nous devons faire face, notamment « Les défis Idéologiques : L’humanité ne parviendra à un niveau de conscience suffisant de son interdépendance qu’en se mettant d’accord, au-delà du seul universalisme occidental, sur un universalisme pluriel, respectant la diversité des cultures et des croyances tout en cherchant un dénominateur commun, probablement basé sur les principes convivialistes. «
Cela nourrit mes incertitudes, ai-je le droit de jouer les enfants peureux ou prôner l’ouverture à l’autre qui peut s’avérer dangereux ? J’ai envie d’aborder les migrations sous leur aspect purement humain sans tenir compte du refus général : sujet ambigu, provocateur, risqué, à l’image d’un essai d’Amin Maalouf au titre évocateur : « Les identités meurtrières » (Paris, Grasset, 1998). Il est vrai que vivre deux identités peut s’avérer délicat, on n’est plus tout à fait celui-ci mais non plus tout à fait celui-là, toujours entre deux, plus ou moins bien accepté, plutôt moins en général.
Suite de mes lectures : Le rapport de Terra Nova (le think tank progressiste selon le sous-titre) de 2025 « Les travailleurs immigrés, avec ou sans eux ? », fait le constat suivant : si nous voulons maintenir notre modèle social, le recours à l’immigration est indispensable, à tous les niveaux. Rapport très bien documenté, statistiques à l’appui.
J’en parle avec les personnes immigrées autour de moi pour connaître le pourquoi et le comment de leur migration. Aucune de leurs histoires ne ressemble à une autre mais chacune parle de courage, de souffrance, de difficultés sans nom. Et à l’arrivée, très mauvais accueil, rebuffades, lenteur des procédures, renvoi dans les pays d’origine sans discernement sur les difficultés. Il serait bon de garder en mémoire qu’il s’agit de décisions difficiles à prendre – quitter son pays, sa famille – pour un voyage long et dangereux, se sentir très seul dans un univers inconnu, semé d’embûches, rejetés par le plus grand nombre. Chacun à sa manière s’accroche en pensée à ce qui lui est cher, sa famille, la nécessité de gagner de l’argent pour eux, à l’espoir d’une vie meilleure – « chaque homme est une histoire sacrée », dit le chant.
L’humanisme est à la mode, né à l’époque de la Renaissance, plaçant l’homme au centre après un Moyen Âge dominé par la religion, il souligne sa dignité, sa valeur, sa liberté et l’incite à acquérir de la connaissance à travers les sciences ou la philosophie. Il est fondé sur le respect de l’autre, ses droits et ses convictions, qu’elles soient religieuses ou laïques.
Dans ses orientations lors du 25e anniversaire, Démocratie & Spiritualité ne dit pas autre chose : « Respect de la personne humaine et du cosmos dans toutes leurs dimensions et leurs liens ; les valeurs de justice, de fraternité, de cohérence ; l’ouverture à l’intériorité, à l’altérité, à la transcendance ; l’attention à ce qui dépasse l’humain, mystère à explorer sans fin dans une logique de dialogue pluraliste et de libre recherche. Pour ceux qui s’y réfèrent, la spiritualité est une dimension de la condition humaine, un souffle de vie venu des origines.
Je suis consciente des difficultés d’accueil, mais il ne peut pas être question ni de quotas, ni de tri selon les compétences. Il s’agit d’accueillir des êtres humains en détresse et de leur accorder une place. J’ai entendu un des migrants dire sa fierté lors de la remise des papiers par le Préfet de la région, disant qu’il est heureux de l’accueillir et de le savoir maintenant membre de notre communauté.
On va évidemment m’objecter que je suis trop idéaliste et que la réalité est différente, dure. Je l’ai connue, cette réalité dure de par mes activités bénévoles auprès des personnes en difficulté. Je sais aussi que cette présence étrangère, trop différente, peut inquiéter et même faire peur. Et c’est justifié par endroits et par moments ; alors quoi, on rejette tout ou on tente ? Les limites de cette réflexion sont évidentes, la réalité n’est pas philosophique, mais j’ai besoin d’exprimer une vision positive ; et qui sait, tout peut arriver.
Si j’en crois le rapport de Terra Nova, accueillir et former les migrants est une nécessité pour notre pays. Nous pouvons aussi constater qu’à maintes reprises la deuxième génération a fait des études et prend des responsabilités dans notre pays. Et c’est heureux pour nous.
Le livreur de ma commande sur internet ne voulait pas être plaint pour la difficulté de son métier. Il peut changer de job à l’intérieur de sa société s’il le souhaite, elle prend soin de lui. Et, juste pour info, la cheffe du chantier important dans ma rue, s’appelle Aissiatou.
Les migrants qui m’entourent m’apportent leur univers et me donnent le courage de continuer à apprendre, de préserver ma joie d’écrire par leurs encouragements, d’être encore un peu utile au lieu de me laisser envahir par le chaos du monde ; tout va mal, vous l’avez remarqué aussi, je suppose. Le renouveau viendra par le courage de ceux qui continuent à se battre et de croire qu’un monde plus paisible est possible, tous habitants confondus. Il est bon de savoir qu’avec des hommes de bonne volonté, cela peut se réaliser, car, écrit Averroès, philosophe, théologien, juriste et médecin musulman andalou de langue arabe du XIIe siècle : L’ignorance mène à la peur – La peur mène à la haine – La haine conduit à la violence – Voilà l’équation.
Monika Wonneberger-Sander, Août 2025
Démocratie & Spiritualité …une instance commune de réflexion invitant à l’action.