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Alain Caillé : Avez-vous de la valeur ? – Le Bord de l’eau – 2025
Alain Caillé est professeur émérite de sociologie à l’Université de Paris Ouest – Nanterre, animateur du mouvement des Convivialistes et auteur de nombreux livres.
Son dernier ouvrage a une tonalité particulière dans notre monde où il est de bon ton de se battre pour avoir « une place au soleil », disposer de nombreux « like » sur les réseaux sociaux, être socialement reconnu. L’auteur y introduit la notion de « valeur », valeur spirituelle, sociale, morale ? – il ne le précise pas. Sans doute tout ça et plus encore, à chacun de creuser personnellement, conscient que l’on touche ici à la dignité de l’homme, source de nombreuses tensions dans la société.
Alain Caillé, fondateur de la Revue du Mauss, s’inspire en grande partie des travaux du philosophe et anthropologue Marcel Mauss (1872-1950) et plus spécialement de sa théorie du don et du contredon, acte dont les racines plongent dans les sociétés traditionnelles ; il serait intéressant de l’analyser pour s’y appuyer et l’appliquer à notre univers moderne, sa profondeur dépasse de loin ce qui a cours actuellement. L’auteur oscille entre la sphère intime (ma valeur personnelle) et la politique générale car don et contredon (cela inclut le bénévolat) ne sont pas très reconnus dans la société actuelle, les structures formelles de la société ne s’en soucient guère, le poids des hiérarchies (politiques, diplômes …) est puissant. Mais la proposition est généreuse : valoriser la capacité de chaque homme de donner-recevoir-rendre, c’est respecter la liberté de chacun, en quête de reconnaissance de sa valeur propre.
L’ouvrage est optimiste, bien documenté, intellectuel certes, mais facile d’accès. Alain Caillé ne se contente pas d’ajouter un écrit aux multiples publications sur la fragilité de nos sociétés, en fondant le mouvement des Convivialistes (du latin convivialis, dérivé de convivere, vivre ensemble) ; celui-ci propose avec son dernier manifeste des idées « pour un monde post-néolibéral », basées sur la coopération plutôt que sur la compétition. Le livre court (188 pages) mais dense sur la valeur est à la fois critique et constructif, un appel à la sobriété, loin des menaces de fin du monde – changement climatique, guerres et autres désastres dont nos actualités sont friandes.
Une question conclut l’ouvrage : « Avez-vous le sentiment de votre propre valeur ? ». Il y a là de nombreuses pistes sociales, spirituelles, politiques à explorer ; développer sans crainte nos qualités humaines et les partager est un droit et une obligation pour nous aider à grandir – dans des dimensions aussi larges que possible. C’est aussi une plongée au fond de soi, goûter les choses intérieurement, s’enrichir spirituellement (détachement) et y associer notre entourage.
