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14L214: « Une omerta française. Secrets d’enfance. » par Daniel Lenoir

Les secrets d’enfance de Roselyne

J’ai compris en lisant « Une omerta française. Secrets d’enfance. » pourquoi Roselyne Bachelot avait  accepté dès que je lui en avais fait la demande de soutenir la pétition que Témoignage Chrétien avait lancé à l’automne 2018 pour réclamer la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire sur les crimes pédophiles dans l’Eglise catholique et dont le refus a conduit à la création de la Ciase, comme le raconte Christine Pedotti dans « Autopsie d’un système : Pour en finir vraiment avec les abus dans l’Eglise ».

Sans vouloir divulgâcher son livre, elle y raconte d’abord comment, jeune élève d’une école privée catholique, elle avait été protégée « d’un ratichon lubrique » grâce à la vigilance d’une mère qui avait elle-même été confrontée au même âge et dans une école catholique également à la pédocriminalité ecclésiastique  avec le suicide d’une amie qui avait été mise enceinte par un prêtre ami de la famille. Cet événement lourd de la mémoire familiale ouvre une réflexion que l’ancienne ministre a tenu à partager avant « le rendez-vous inéluctable du grand départ ». Une réflexion indignée qui s’appuie sur son expérience d’élue locale, de parlementaire, de ministre et de personnage public, mais aussi d’enfant, d’élève, de mère, de pharmacienne et de bénévole dans des associations caritatives et culturelles : une indignation qui ne vise pas que la pédocrimalité mais aussi tous les autres crimes sexuels « couverts par une hiérarchie ivre de corporatisme et d’orgueil » ; une indignation alimentée par la  révolte de voir ses « amis atteints du sida désignés comme puni pour un péché imaginaire » et plus généralement face à « une homophobie hypocrite », elle qui fut l’une des rares parlementaires de droite à voter pour le Pacs et le mariage pour tous ;  une indignation nourrie de l’humiliation devant « le pouvoir des clercs dans l’Eglise », la place minorée qu’y tiennent des femmes qui ne seront « jamais traitée à l’égale des hommes » ; une indignation qui explique son refus des « manipulations pratiquées (par les clercs) sur ceux qui font les lois de la République » et dont elle a été elle-même l’objet dans son Maine et Loire natal et catholique, « fief de la démocratie chrétienne », comme de ce qui reste d’un « antisémitisme récurrent et revendiqué » ; et qui explique aussi un attachement à une laïcité « garante de la démocratie » face au « délire obsidional et la conviction » de nombre d’institutions catholiques « que les lois de la République (sont) opposées aux valeurs chrétiennes ».

C’est le texte d’une agnostique, « pas assez prétentieuse pour se déclarer athée », mais qui sait profondément ce qu’elle doit à l’Eglise catholique pour en revendiquer les valeurs sur lesquelles elle-même s’est assise. Un réquisitoire vivant et documenté, dans son style inimitable, à la mesure de la déception qu’elle a vécue.

Dijon, le 27 novembre 2025

 

A propos Régis Moreira

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