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13L214: Kolkhoze, un exercice de généhistoire par Daniel Lenoir

Kolkhoze, un exercice de généhistoire

Kolkhoze : c’est le nom de ces fermes collectives soviétiques qui, comme elles étaient de statut coopératif, étaient considérées par ma prof d’histoire du lycée de Noeux les mines, communiste et fille de résistant, comme plus humaines que les fermes d’Etat, les sovkhozes, partageant ainsi avec Hélène Carrère d’Encausse née Zourabichvili, héritière d’une famille de russes blancs dont le père fut éliminé à la Libération pour faits de collaboration et qui fut députée européenne RPR, « la conviction étrange qu’un kolkhoze c’était mieux qu’un sovkhoze ».

Kolkhoze c’est aussi le nom qu’Hélène avait donné à ce rituel intime du dortoir partagé avec ses trois enfants, Emmanuel, l’aîné, l’auteur de ce roman familial, Nathalie la cadette, avocate spécialisée en droit de la santé et Marina la benjamine, médecin et animatrice télé, quand leur mari et père Louis Carrère dit Carrère d’Encausse par transformation en particule de la première lettre du nom de sa mère, Dencausse, était parti pour ses tournées d’inspection dans les agences locales d’un groupe d’assurance mutualiste.

Kolkhoze c’est le dernier moment que les trois enfants ont vécu avec leur mère dans l’unité de soins palliatifs de Jeanne Garnier quand, rassemblés autour d’elle, ils ont, « pour la dernière fois fait kolkhoze ».

Kolkhoze c’est donc le titre du dernier récit d’Emmanuel Carrère : un roman familial en forme de roman généalogique, une sorte de matrohistoire en forme de généhistoire, qui courre sur plus d’un siècle en s’appuyant sur les recherches familiales du mari et du frère du personnage principal, la défunte secrétaire perpétuelle de l’Académie française, celles qui avait voulu imposer à l’encontre l’usage populaire celui du féminin pour désigner la maladie qui nous a contraint aux confinements.

Ni exercice d’admiration filiale, ni matricide littéraire à la façon de la Folcoche par Hervé Bazin, c’est un récit profondément honnête que nous livre l’auteur de L’adversaire ou du Royaume, appliquant à l’histoire de sa mère, et en creux à celle de son père, ce qui fait sa méthode et son style inimitables, le dialogue entre la reconstitution historique et les résonances personnelles, voire intimes, qu’elle suscite ou avec lesquelles elles s’entrecroisent.

Paris, Croulebarbe, le 26 novembre 2025 

A propos Régis Moreira

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